Nord Pas-de-Calais, ME
Dernier essai le - Score : /20
Consignes
1. Vous résumerez le texte en 120 mots (une marge de 10 % en plus ou en moins est admise). Au-delà ou en deçà de cette marge, vous vous exposez à une note éliminatoire (10 points).
Vous indiquerez à la fin de votre résumé le nombre de mots que vous aurez utilisés. Tous les mots comptent (par exemple : « c'est-à-dire » compte pour 4 mots ).
2. A partir du point de vue de l'auteur, vous analyserez les questions que pose ce sujet et développerez une argumentation personnelle sur cette situation au regard de la fonction d'un moniteur éducateur sur le plan professionnel (10 points).
Durée : 3 heures.
Texte
« Comme sur des roulettes »
Nous sommes au dernier jour d'un stage approfondissement BAFA. Les stagiaires sont invités par petits groupes à s'auto-évaluer avant de recevoir l'évaluation de leurs pairs et de connaître ensuite l'avis des formateurs. Vient le tour de Jean-François qui parle de ses difficultés à repérer ses limites. C'est Samuel qui, le premier, renvoie la façon dont il a perçu son alter ego : « j'ai vraiment été impressionné par ta pêche et ta joie de vivre. Toujours le premier à s'amuser et à entraîner le groupe. J'avais envie de te remercier pour tout ce qui tu m'as apporté, ainsi que pour l'amitié que tu m'as accordée ».
Dans le groupe, l'émotion est palpable. Pourtant, Jean-François reçoit cette marque de reconnaissance avec sérénité. Il reste égal à lui-même, tel qu'il l'a été tout au long de la session : spontané, naturel et authentique. Jean-François Archambeau n'est pas un animateur de centre de vacances et de loisirs ordinaire : il est en fauteuil roulant. Il a déjà passé brillamment l'étape du stage de base, puis celle du stage pratique, se faisant apprécier pour son dynamisme et la pertinence de ses réactions.
Le stage BAFA comme dans un fauteuil
Quant Bertrand Nesch, responsable du stage, apprit que l'un de ses stagiaires était porteur de handicap physique, son premier réflexe fut de refuser de faire de différences. « Nous avons juste dû aménager des toilettes qui n'étaient pas adaptées. Nous avons aussi fait poser des plans inclinés. Je souhaitais que l'environnement soit le moins handicapant possible. Pour le reste, j'ai estimé que ce stagiaire allait devoir se débrouiller comme les autres ».
Pour la plupart des stagiaires, ce fut le premier contact avec le handicap physique. Ils furent très vite subjugués par le caractère enjoué, l'enthousiasme et la sociabilité de Jean-François Archambeau. Ce jeune lycéen de terminale STT a toujours suivi une scolarité ordinaire et se destine aux métiers des ressources humaines. Sa situation, il l'assume complètement, acceptant son handicap mais refusant de s'y résigner. « Je ne supporte pas ceux qui affirment ne pas pouvoir faire quelque chose à cause de leur handicap » explique-t-il.
Habitué depuis qu'il est tout jeune à animer des jeux ou des soirées avec ses copains, il se tourne naturellement vers l'animation. Quand il envoie son dossier d'inscription BAFA aux Francas, il précise sa situation. Tout naturellement, la fédération d'éducation populaire lui propose une session dans un lieu où les locaux d'hébergement et les salles de formation sont de plain-pied. Tout s'y passa bien : « personne n'a vraiment fait attention à mon handicap » constate, comblé, Jean-François Archambeau.
Animateur avec des enfants valides
Pour son stage pratique, il décida de se déplacer pour remettre son CV et sa lettre de motivation en main propre. Beaucoup de structures accueillirent sa demande avec bienveillance. D'autres se montrèrent plus gênées.
C'était pour lui un test : il renonça à aller plus loin avec celles qui s'étaient montrées hésitantes. Erik Bouzidi, directeur de l'office socioculturel de Montoir de Bretagne, fut l'un de ceux qui le reçurent.
Son souci n'était pas tant le handicap du candidat qui se présentait à lui, mais la question de ses capacités à assurer le travail d'animateur auquel il postulait. L'entretien fut l'occasion de questions très franches : que pouvait-il assurer face à un groupe d'enfants ?
Pouvait-il les prendre en charge d'une manière autonome ? Pouvait-il assurer leur sécurité matérielle et affective ? Comment ferait-il pour leur faire traverser la rue ?… Jean-François Archambeau ne se démonta pas, répondant précisément sur ce qu'il pensait pouvoir effectuer et ce qu'il ne pourrait pas assurer. Il avait l'intention de répondre aux éventuelles questions des enfants sur son handicap, mais pas de mettre d'emblée en avant sa situation. Il voulait avant tout apparaître comme un animateur. Honnêtement, il s'ouvrit sur ses interrogations quant à sa capacité à affirmer son autorité ; réussirait-il à faire face à des enfants qui, refusant de respecter les consignes, se mettraient à courir dans tous les sens ? Erik Bouzidi le reconnaît : ce n'est pas sans une certaine appréhension qu'il recruta finalement cet animateur atypique.
Au final, « les inconvénients supposés ont eu des conséquences tout à fait mineures en comparaison des avantages constatés » explique-t-il. Quand il s'agissait de traverser la route, les enfants avaient le souci de leur animateur intégrant ainsi les règles de sécurité avec d'autant plus d'efficacité. Du côté des parents, ce fut d'abord la surprise. Des questions ont fusé : « c'est lui qui va s'occuper de nos enfants ? ». Et puis, très rapidement, Jean-François Archambeau n'a plus été reconnu que pour ses capacités d'animateur.
Avoir un animateur porteur d'un handicap physique s'est avéré donc une chance, confirme Erik Bouzidi : « Non seulement Jean-François a montré une sensibilité particulière et un sens de l'écoute qui lui ont permis d'anticiper sur les problèmes que les enfants pouvaient avoir, mais il a été l'un des animateurs les plus écoutés et les plus respectés. D'ailleurs, je le fais à nouveau travailler en juillet… ».
Jacques Tremintin
Lien social n° 819, 30 novembre 2006