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Sujet

Sujet

I. Question relative aux textes proposés (6 points)
À partir du corpus proposé, vous analyserez la place de la norme dans la construction et l'appropriation du lexique.
II. Questions ayant trait à la grammaire, à l'orthographe et au lexique (6 points)
II. 1. Grammaire
Relevez et analysez les différentes propositions de cet extrait du texte 3 :
Le mot que je cherche, ou plutôt dont je guette avec patience le surgissement dans les parages d'un autre qui me sert d'appât, lui est bien apparenté de quelque façon.
II. 2. Orthographe
Expliquez les valeurs orthographiques de la lettre « i » dans le début de la phrase suivante, extraite du texte 3 :
Le principal avantage de la rime des anciens poèmes était d'obliger l'écrivain…
II. 3. Lexique
Classez les mots et expressions soulignés selon leur signification et analysez la formation du mot « exogamie » (dernière ligne de l'extrait) ; expliquez ensuite l'utilisation de ce mot dans l'expression « les vertus éprouvées de l'exogamie ».
Dictionnaires de synonymes. Certes, ils rendent quelques services à la mémoire verbale qui devient plus rétive avec les années. Mais combien limités ! Le mot que je cherche, ou plutôt dont je guette avec patience le surgissement dans les parages d'un autre qui me sert d'appât, lui est bien apparenté de quelque façon. Seulement il l'est plus souvent, hélas ! de la main gauche que de l'autre, et les pudiques dictionnaires ne connaissent que les unions légitimées. Les mystérieux airs de famille qui guident seuls la quête de l'écrivain dans le clair-obscur du vocabulaire sautent les barrières des unions officielles ; pour lui, la langue vibre surtout dans ses compromissions adultères. Familles de mots légales et trop homologuées, il vous hait !
Le principal avantage de la rime des anciens poèmes était d'obliger l'écrivain, par ses exigences mécaniques, à forcer le blocus du cercle étroit des mots substituables, à rendre au langage ses belles couleurs par les vertus éprouvées de l'exogamie.
Textes
Texte 1
« Lorsque les mots manquent aux élèves, c'est le sens qu'ils tentent de donner au monde qui s'obscurcit. Les enfants qui franchissent la porte de l'école disposent certes de la parole, mais leurs relations aux mots sont extrêmement inégales : la conscience de ce qu'est un mot, du sens qu'il porte vers l'Autre, du territoire qu'il occupe par rapport aux autres mots, est, pour certains enfants, extrêmement confuse. Certains enfants utilisent leur langue dans une sorte de « brouillard sémantique » qui n'autorise qu'une conduite linguistique de très faible amplitude. Ils parlent à vue ; c'est-à-dire uniquement de ce qu'ils voient et seulement à ceux qu'ils voient. Parmi tous les enfants que l'école accueille, certains ont ainsi eu la chance qu'on leur ait donné le goût de l'exigence, l'appétit de la précision ; d'autres ont dû se réfugier dans le flou et le banal pour ne pas s'exposer, pour ne pas se dévoiler à un monde qu'ils pensaient hostile et dangereux. L'imprécision des mots, devenue systématique, a entraîné une grave insécurité linguistique parce qu'on ne leur a pas transmis l'ambition d'élargir le cercle des choses à dire et celui de ceux à qui on les dit. Cantonnés à une communication de stricte connivence, ils se sont repliés sur un vocabulaire flou et réduit. »
Alain BENTOLILA, Rapport de mission sur l'acquisition du vocabulaire à l'école élémentaire, 23 février 2007, disponible sur www.education.gouv.fr/cid4764/l-acquisitionvocabulaire-ecole-elementaire.html, 23 février 2007, 20 p. [ici pp. 3-4]

Texte 2
« […] En matière de langue, [les] normes se confondent peu à peu avec la notion d'« usage », c'est-à-dire avec un faisceau d'attitudes, de choix, de jugements, qui viennent limiter et orienter dans l'histoire et dans la culture les virtualités beaucoup plus larges de ce que la théorie appelle « la langue », structure et dynamisme abstrait, mal connu, théorique, et que certains, à coups d'hypothèses, pensent avoir reconnu et décrit. Il faut admettre qu'il y a eu des coups heureux, de beaux modèles, et qu'on en sait plus sur la phonologie, sur la syntaxe, qu'il y a cinquante ou soixante ans. Mais du côté des mots (puisque des mots il doit s'agir) ? Là aussi, nous avons eu du nouveau : en sémantique, en morphologie, du côté des régularités qu'on peut abstraire. Beaucoup moins du côté de la description globale des unités qui forment cette bizarre machine, affreusement compliquée, à moitié incohérente, engluée dans la pratique des discours, compromise dans les difficultés de la communication entre nous tous, compromettante par ce qui, en elle, fonctionne et se répète, incompréhensible par ce qui se défait et se refait sans cesse par elle, j'ai nommé le lexique. Disons pour simplifier : les mots (c'est réducteur, bien sûr, mais commode et familier). À leur propos, quelle littérature ! Nous les « employons » mais ils nous « trompent ». Ils nous servent à « penser », à « parler », mais, dialectiquement, ils nous pensent et ils nous parlent. Ils servent à dire le vrai et le faux, le juste et l'injuste. Plus et plus dangereux : ils font, ils limitent les concepts de vrai et de faux, de juste et d'injuste, la doxa et le paradoxe. Pire : pour les dénoncer, il faut user d'eux. Et derrière les formes : morphologie et système, emprunts et histoire, le sens, stable-instable, dé-froissable (neutralisable) et in-dé-froissable (pourri de connotations, de traces d'actes, perverti cent mille fois par jour, employé sans être maîtrisé). Et pourtant, bien avant la linguistique, bien avant les soi-disant sciences de l'homme – faut-il vraiment se dire pour avoir une chance d'être… – de gros livres en forme de listes les recueillent, ces mots. On les appelle dictionnaires. D'abord consacrés à l'explication, à la traduction – ils coïncident, en Occident, avec le recul de la connaissance du latin et du grec, qu'ils sont chargés de contrebalancer – ils se mettent, au xviie siècle, à décrire l'univers sémantique de la langue dans la langue même, puis, parallèlement, l'origine des mots (Ménage). Ces éléments seront repris au xixe siècle, après une longue parenthèse terminologique et encyclopédique, pour aboutir à l'instrument mi-pédagogique, mi-culturel, et toujours didactique, que nous connaissons. Mais cet instrument, qu'il s'agisse en France des gros dictionnaires ou des dictionnaires d'apprentissage plus réduits, de descriptions de la langue ou de recueils encyclopédiques, comment est-il perçu ? La plupart y voient tout simplement une image fidèle du lexique ; les très nombreuses informations nouvelles pour eux induisent l'impression illusoire d'une exhaustivité et le sentiment masochiste que ce qui n'est pas « dans le dictionnaire », même si c'est un élément familier, n'appartient pas à la langue, « n'est pas français ». Cette attitude tend à reculer, mais n'a pas disparu. Plus tenace l'illusion que le dictionnaire est neutre, objectif, entièrement représentatif, comme une sorte d'échantillon de la réalité du langage. Évidemment, il n'en est rien. Dès lors, d'autres lecteurs, d'autres témoins, mieux informés, mettent ce type d'ouvrage en accusation et lui dénient toute objectivité. Le dictionnaire est-il coupable ? Faut-il brûler les dictionnaires ? Ce genre de questions, plutôt journalistiques, recouvre pourtant une vraie interrogation. »
Alain REY, « Norme et dictionnaire ou l'arbitraire a toujours tort », in Le français aujourd'hui, numéro 148, février 2005, 128 p. [ici pp. 9-10]

Texte 3
« Dictionnaires de synonymes. Certes, ils rendent quelques services à la mémoire verbale qui devient plus rétive avec les années. Mais combien limités ! Le mot que je cherche, ou plutôt dont je guette avec patience le surgissement dans les parages d'un autre qui me sert d'appât, lui est bien apparenté de quelque façon. Seulement il l'est plus souvent, hélas ! de la main gauche que de l'autre, et les pudiques dictionnaires ne connaissent que les unions légitimées. Les mystérieux airs de famille qui guident seuls la quête de l'écrivain dans le clair-obscur du vocabulaire sautent les barrières des unions officielles ; pour lui, la langue vibre surtout dans ses compromissions adultères. Familles de mots légales et trop homologuées, il vous hait ! Le principal avantage de la rime des anciens poèmes était d'obliger l'écrivain, par ses exigences mécaniques, à forcer le blocus du cercle étroit des mots substituables, à rendre au langage ses belles couleurs par les vertus éprouvées de l'exogamie. Même dans la prose, il faut que le son sache tenir tête au sens. On n'est pas écrivain sans avoir le sentiment que le son, dans le mot, vient lester le sens, et que le poids dont il est ainsi doté peut l'entraîner légitimement, à l'occasion, dans de singulières excursions centrifuges. L'écriture comme la lecture est mouvement, et le mot s'y comporte en conséquence comme un mobile dont la masse, à si peu qu'elle se réduise, ne peut jamais être tenue pour nulle, et peut sensiblement infléchir la direction. »
Julien GRACQ, En lisant, en écrivant, José Corti, 1993, 302 p. [ici p. 148]

Corrigé

Corrigé

I. Question relative aux textes proposés (6 points)
Proposition de corrigé
Il s'agit ici, à partir d'un ensemble constitué de trois textes assez hétérogènes, d'analyser « la place de la norme dans la construction et l'appropriation du lexique ».
La norme, qui fédère des conventions et des jugements de valeur, s'applique au lexique dans la mesure où le vocabulaire qu'on emploie est sujet à des registres différents, et paraît plus ou moins approprié suivant les contextes. À ce titre, il est important de s'interroger, précisément, sur la place de la norme dans la construction et l'appropriation du lexique. Le corpus proposé, composé d'un rapport de mission d'Alain Bentolila (2007), d'un article d'Alain Rey (2005) et d'un extrait de roman autobiographique de Julien Gracq (En lisant, en écrivant, 1993), apporte quelques éléments sur ce sujet. Les auteurs, même s'ils développent des argumentaires pour le moins différents, d'une part soulèvent la question du rapport au lexique normé, et, d'autre part, décrivent en quoi la norme s'appuie sur une fausse neutralité.
Alain Bentolila, qui dénonce les inégalités linguistiques en milieu scolaire, rappelle dans son Rapport de mission sur l'acquisition du vocabulaire à l'école élémentaire (2007), que l'exigence en matière linguistique, et plus spécifiquement lexicale, est une nécessité. Parce que les mots permettent de dire le monde et de l'objectiver, ils en permettent un accès plus abouti et de multiples adaptations. L'acquisition du lexique est donc un levier pour l'émancipation : il procure, à celui qui en use, une confiance l'« autorisant » à élargir les domaines et les situations de communication. Alain Rey se saisit de cette question à la faveur de ce qu'il envisage, de son côté, comme un rapport au sens. Il en veut pour preuve l'usage du dictionnaire, instrument « mi-pédagogique, mi-culturel, et toujours didactique », mais qui ne donne la signification des mots qu'à travers un « usage » prétendu. En effet, selon Alain Rey, ce type d'ouvrage n'est pas conçu pour prendre en compte les représentations de la langue que s'en font les usagers eux-mêmes. Ces « pudiques dictionnaires », comme les appelle ironiquement Julien Gracq, oublient ainsi que la langue « vibre » avec ses locuteurs. Dans cette perspective et selon Alain Bentolila, qui parle des « relations aux mots » que construisent les élèves, l'enjeu pour eux consiste, dans cette appropriation, dans une « exigence de précision » censée les prémunir contre le « repli », et leur donner la possibilité d'enrichir constamment leur vocabulaire. Si Alain Bentolila ne traite qu'indirectement la question des outils qui satisfont aux besoins, aux nécessités de « précision » lexicale, il s'intéresse aux mécanismes psycho-sociologiques qui interfèrent sur les situations de communication et qui déterminent favorablement ou non les processus d'appropriation et de construction du lexique.
Tandis qu'Alain Rey et Julien Gracq, dont le propos porte ouvertement sur le dictionnaire comme instrument de référence, en dénoncent et en contestent la validité, Alain Bentolila met en évidence le rôle des représentations attachées à la référence normée et du frein que cette dernière peut constituer à l'acquisition du lexique : ce qu'il dénonce, pour sa part, à travers un « sentiment d'insécurité linguistique ». Alain Rey rappelle de son côté que l'appropriation et la construction du lexique sont tributaires des situations de communication. Selon lui la norme linguistique tend à s'aligner sur l'usage, si bien que le dictionnaire ne renvoie pas l'image d'une langue abstraite, « objectivée » dans toutes ses potentialités, mais promeut un reflet arbitraire, calqué sur les « pratiques » de la langue. De la sorte, si Alain Rey concède le fait que la langue permet de parler, il rappelle que « dialectiquement » elle « nous parle » et de la sorte nous piège. En d'autres termes, les mots nous imposent leurs propres limites tout en nous donnant l'illusion de pouvoir, grâce à eux, dépasser les nôtres.
Ainsi la norme lexicale est-elle susceptible de générer, selon Alain Bentolila et selon Alain Rey, une forme de handicap linguistique pour l'un et de cécité cognitive pour l'autre. Alain Bentolila explique à ce titre l'importance que revêt l'éveil de la conscience des mots, de manière à sortir d'un « brouillard sémantique ». Or, on comprend qu'il s'agit chez lui de dénoncer une communication « de stricte connivence » (autrement dit non normée), plus qu'une illusoire neutralité de la norme. Ce point de vue est en partie contesté par Julien Gracq, qui attend du vocabulaire qu'il permette de sortir des « exigences mécaniques » de la norme. Il l'est aussi par Alain Rey, pour lequel l'appropriation et la construction du lexique emprunte, clairement, d'autres voies que celles d'un dictionnaire qui s'éloigne dans bien des cas d'un sens qui n'est pas toujours « neutralisable », et qui, de ce fait, peut être « pourri de connotations » et « instable ». Le témoignage de Julien Gracq en particulier met explicitement en doute l'efficacité du « dictionnaire des synonymes », associé aux chemins « officiels » pour trouver des « mots substituables » : selon Gracq, celui qui écrit tient compte de la dimension sonore des mots, une acoustique qu'il tend quelquefois, dans son travail, à privilégier sur la dimension sémantique.
Confronté à ce qu'on pourrait appeler deux témoignages, dont celui de Julien Gracq est clairement autobiographique, le Rapport d'Alain Bentolila semble maintenir un cap dont il discute en filigrane la validité. Les textes ont néanmoins conjointement pour mérite de montrer combien la norme, y compris la norme scolaire, est liée aux représentations que l'on se fait de l'usage. Les auteurs n'hésitent pas non plus à dénoncer le fait que la norme constitue par moments, si ce n'est une entrave, du moins une vraie difficulté pour l'appropriation et la construction du lexique.
Recommandations
• Cette partie de l'épreuve présente plusieurs difficultés : d'une part, elle exige une bonne compréhension des documents, qui implique une certaine habitude à lire vite et bien. L'un des exercices les plus productifs dans votre préparation consistera à trier, dans tous types de textes, les moments où vous sentez que l'auteur prend position, exprime un point de vue, conclut, déduit, parmi tout ce qu'il y a dans les documents d'exemples, de commentaires, de redites et de reformulations intermédiaires. Concrètement, dans chacun des cas, c'est un tiers à la moitié du texte qui donnera des éléments de réponse à la question qui vous est posée (qu'il s'agisse d'une synthèse ou d'une analyse). Bien comprendre le texte, c'est donc saisir ce qui, à l'intérieur, donne des éléments de réponse à la question que soulève l'épreuve.
• Ensuite intervient la gestion du temps : vous disposez d'1 h 20 environ pour traiter cette partie de l'admissibilité, autrement dit de très peu de temps. Il s'agit donc de vous organiser d'abord matériellement : voilà ce que je mets dans telle marge, voilà ce que j'applique dans l'autre. Ce que je fais de mes surligneurs, ce que j'entoure, comment je numérote, ce que je barre éventuellement : ces opérations matérielles, au concours, font gagner de précieuses minutes. Ne pas savoir, avant l'épreuve, comment manipuler matériellement les supports, c'est prendre un vrai risque.
• Pour ce qui nous occupe ici, l'épreuve consistait dans une analyse. À partir de la question posée (« quelle place de la norme » ?), il s'agissait donc de relever, dans les documents, ce qui coïncide, avec plus ou moins d'exactitude, avec cette problématique. Une fois le tri effectué, reste à opérer des recoupements (les « axes »). De fil en aiguille, vous saisissez que vous pouvez regrouper ceci et cela, et peut-être êtes-vous déjà en mesure de nommer ce qui deviendra des parties de votre plan. C'est à ce moment-là que l'utilisation des marges et du brouillon est déterminante : avec votre nomenclature à vous (souvent les candidats emploient des numéros), vos recoupements s'organisent, parmi lesquels apparaissent des rapprochements entre les auteurs, mais aussi ce qui les distingue et ce qui, en somme, fait que leurs contributions se complètent mutuellement.
• Indiquons que les correcteurs du CRPE n'auront pas de plan préétabli au moment des corrections, mais une énumération d'axes possibles que les candidats peuvent organiser comme ils l'entendent, pourvu que cela soit visible et tout de suite accessible pour celles et ceux qui les lisent !
Dans le cas présent, non seulement les textes ne parlaient pas tout à fait de la même chose, mais encore répondaient-ils tous trois à d'autres questions que celle posée dans l'intitulé du CRPE. Pour autant, dans la mesure où il s'agit d'un concours, tout le monde est confronté aux mêmes difficultés !
II. Questions ayant trait à la grammaire, à l'orthographe et au lexique (6 points)
II. 1. Grammaire
Il est demandé ici de relever et d'analyser les différentes propositions (grammaticales) d'un extrait du texte 3. Pour rappel, une proposition est un groupe verbal contenant au minimum un verbe et son sujet. On parle de propositions indépendantes quand elles apparaissent pour elles-mêmes, et de propositions subordonnées quand elles sont dépendantes d'un mot ou d'un groupe de mots. La tradition grammaticale impose encore de parler de propositions principales, quand elles correspondent à des groupes verbaux supports de subordonnées.
« Le mot que je cherche, ou plutôt dont je guette avec patience le surgissement dans les parages d'un autre qui me sert d'appât, lui est bien apparenté de quelque façon. »

1. Cette phrase contient la proposition (dont font partie les subordonnées décrites ci-après) « Le mot […] lui est bien apparenté de quelque façon. » Le verbe noyau de la proposition, « être », a pour sujet « Le mot que je cherche, ou plutôt dont je guette avec patience le surgissement dans les parages d'un autre qui me sert d'appât. »
On peut parler indifféremment ici de proposition indépendante (c'est le cas !) ou de proposition principale, au vu de l'emboîtement des subordonnées à l'intérieur du groupe nominal sujet.
2. À l'intérieur du groupe nominal sujet du verbe « être », apparaissent plusieurs subordonnées :
2. 1. « que je cherche »
Il s'agit d'une proposition subordonnée relative, épithète (liée et postposée) de l'antécédent « mot ». Le pronom « que », dans la subordonnée, est complément d'objet direct du verbe « chercher ».
2. 2. « dont je guette avec patience le surgissement dans les parages d'un autre qui me sert d'appât »
Coordonnée à la précédente par la conjonction de coordination « ou » (renforcée par l'adverbe « plutôt »), cette subordonnée relative, introduite par « dont », a la même fonction (épithète postposée, cette fois-ci détachée, de « mot »). Le pronom « dont », dans la subordonnée, est complément du nom « surgissement ».
2. 3. « qui me sert d'appât »
Cette proposition subordonnée, qui est incluse (« enchâssée ») dans la précédente (2. 2.), est une relative, épithète liée et postposée du pronom « autre », l'antécédent du pronom « qui ». Ce dernier, dans la subordonnée, est sujet du verbe « servir ».
Recommandations
• L'organisation de la réponse à cette question est pour le moins délicate : dans les faits, la phrase contient une proposition indépendante à l'intérieur de laquelle le sujet du verbe principal, le groupe nominal construit autour de « mot », contient deux propositions subordonnées dont l'une d'elles, la deuxième, contient elle-même une autre subordonnée.
• La question des propositions subordonnées est l'une des favorites des concepteurs de sujets. Or, les attentes des examinateurs sont assez unanimes en la matière : les candidats sont appelés à délimiter correctement les propositions concernées (qui commencent toutes, au CRPE, par un subordonnant), et ensuite à les classer, autrement dit à en regrouper quelques-unes autour d'un trait commun, et faire de même pour les autres.
• Plusieurs classements demeurent possibles, mais nous vous conseillons de passer par le plus économique pour vous : selon les subordonnants eux-mêmes. Vous regrouperez ainsi, d'un côté, les relatives (avec les subordonnants qui, , lesquels, etc.), et de l'autre les conjonctives (avec quand, puisque, si par exemple). Toutes les grammaires scolaires pourront vous aider si des révisions s'imposent dans ce domaine.
• Les classements par fonctions sont plus délicats (par exemple en regroupant les subordonnées sujet, et ensuite celles qui sont compléments du nom, du verbe, ou encore en distinguant les complétives des circonstancielles) : ces classements imposent des redites en termes de catégories (vous devrez dans tous les cas indiquer si les subordonnées sont relatives ou conjonctives).
• Notons que si le cas apparaît, on peut ajouter au plan (1. Subordonnées relatives / 2. Subordonnées conjonctives) un autre item : celui des subordonnées interrogatives (du type (peux-tu me dire) combien sont venus ? / (savez-vous) qui passera demain ? / (elle se demande) quand ils passeront).
• Ajoutons qu'au sein des propositions subordonnées relatives, certains distinguent par ailleurs les adjectives (ou non restrictives), des restrictives (ou déterminatives).
• Il s'agit pour autant d'une indication complémentaire, qui signifie que, parmi les relatives, les unes peuvent être enlevées sans compromettre la signification de l'ensemble (les adjectives), comme c'est bien souvent le cas des épithètes, alors que d'autres non (les restrictives) : dans ce dernier cas, leur présence est déterminante, au même titre que ce qu'on appelle les compléments déterminatifs du nom.
Libre à vous d'apporter ces indications complémentaires, qui sont néanmoins à double tranchant : si vous ne faites pas d'erreur, l'examinateur sera tenté d'être plus clément pour peu qu'autre chose lui paraisse peu clair ; si vous en faites, cela risque de vous desservir.
• Rappelons enfin que l'une des attentes des correcteurs consiste à vérifier, concernant les relatives, si les candidats ont saisi que le pronom relatif a une fonction (en plus d'être un subordonnant) à l'intérieur de la proposition subordonnée. Qui, par exemple, est généralement sujet du verbe de la relative, que le plus souvent complément, tout comme .
II. 2. Orthographe
Expliquer les « valeurs orthographiques » de la lettre « i » (dans le début d'une phrase extraite du texte 3), impliquait de traiter les valeurs graphiques et phoniques de la lettre, qui est aussi, sur le plan acoustique, une voyelle ou dans certains cas une semi-consonne. L'extrait de phrase est le suivant :
« Le principal avantage de la rime des anciens poèmes était d'obliger l'écrivain… »

1. Le « i » conserve sa valeur vocalique de [i] :
  • dans la deuxième syllabe de « principal » ;
  • dans la première syllabe de « rime » ;
  • dans la deuxième syllabe d'« obliger » ;
  • dans la deuxième syllabe d'« écrivain ».
2. Le « i » correspond à la semi-consonne [j] :
dans la deuxième syllabe d'« anciens », où le « i » se prononce comme un yod.
3. Le « i » est nasalisé :
  • en voyelle pré-posée à « n », dans le digramme « in » de la première syllabe de « principal » : « i(n) » correspond alors au phonème [in] ;
  • en voyelle centrale dans le trigramme « ain » de la troisième syllabe d'« écrivain », où le segment correspond là aussi à [in].
4. Le «  i » prend la valeur sonore de [è] :
en voyelle post-posée à « a », dans le digramme « ai » de la deuxième syllabe de « était ».
Recommandations
Outre l'alphabet phonétique (international), qu'il est préférable de connaître (il est utilisé notamment dans les manuels scolaires et dans les fiches EVA du primaire), il convient ici d'être sensible aux correspondances graphies-phonies. C'est ce que l'intitulé du CRPE appelle les « valeurs orthographiques » de la lettre (en fait, il aurait plutôt fallu parler de « valeurs phonologiques »…) : vu la configuration de l'exercice, il ne pouvait en être autrement, à moins de parler de « valeurs » morphogrammatique du « i » de « était » et phonogrammatiques pour les autres, ce qui ne permettait pas aux correcteurs d'appliquer la grille de notation.
II. 3. Lexique
Les candidats sont appelés ici à classer les mots et expressions soulignés selon leur signification, et à analyser la formation du mot « exogamie » (dernière ligne de l'extrait), pour en expliquer ensuite l'utilisation dans « les vertus éprouvées de l'exogamie ».
1. Voici l'extrait concerné pour la première partie de l'exercice :
Le mot que je cherche, ou plutôt dont je guette avec patience le surgissement dans les parages d'un autre qui me sert d'appât, lui est bien apparenté de quelque façon. Seulement il l'est plus souvent, hélas ! de la main gauche que de l'autre, et les pudiques dictionnaires ne connaissent que les unions légitimées. Les mystérieux airs de famille qui guident seuls la quête de l'écrivain dans le clair-obscur du vocabulaire sautent les barrières des unions officielles ; pour lui, la langue vibre surtout dans ses compromissions adultères. Familles de mots légales et trop homologuées, il vous hait !
Julien Gracq utilise la métaphore de la chasse ou de la pêche pour évoquer la nature du travail de l'écrivain : le terme « appât » sert, ici, d'embrayeur à l'isotopie (réseau sémantique) dans laquelle on peut inclure « guetter », « avec patience », « parages » et « surgissement ».
La question posée demande de prolonger cette dynamique figurale en appelant à « classer les mots et expressions selon leur signification »… Exprimée telle quelle, cette question doit être réinterprétée à travers les réseaux (ou « champs ») lexicaux. Nous y relevons par conséquent :
  • un réseau sémantique lié à la filiation : Julien Gracq associe de façon figurée les « mots » à des espèces vivantes, « apparenté[es] » ou non, entre elles. Nous pouvons leur associer le mot « familles » et l'expression « mystérieux airs de famille » ;
  • un autre réseau, lié à l'union officielle (autrement dit l'union maritale, avec une connotation juridique évidente) : ainsi les mots ou expressions « unions officielles » ou encore « légitimées », « légales », « homologuées », « de la main gauche » (celle qui porte l'alliance), mais aussi « adultères », renvoient-ils tous à la même isotopie.
2. Le mot « exogamie » est formé du préfixe « exo » (du grec exô qui signifie « hors de, dehors ») et du radical « -gamie » (du grec gamos qui signifie « mariage »). Par le terme « exogamie » on désigne les unions qui ont lieu entre groupes sociaux différents, à l'inverse d'« endogamie » qui désigne les unions entre membres d'un même groupe social.
Julien Graq loue « l'exogamie » qui selon lui a des « vertus éprouvées » ou qui, autrement dit, a prouvé ses effets bénéfiques. L'auteur fait allusion aux effets favorables du brassage génétique sur les espèces : grâce à lui les risques de transmission de maladies génétiques et de pathologies liées à la consanguinité sont limités.
Appliquée aux mots, l'exogamie renvoie métaphoriquement à des unions (des associations) de mots ou d'expressions qui ne sont pas compatibles a priori, mais qui peuvent apparaître ensemble à la faveur d'un vocabulaire imagé.
Recommandations
• Pour le traitement des questions dites « de lexique », plusieurs notions sont incontournables.
D'une part, concernant la formation des mots, rappelons qu'il n'en est que deux possibles en français : soit par dérivation, soit par composition. La langue dérive un mot d'un autre généralement par affixation : dans ce cas, à un lexème, elle ajoute un affixe (en début de mot, un préfixe ; en fin de mot un suffixe – et plus rarement, en milieu de mot, un infixe). Par exemple, le lexème cri peut recevoir un suffixe verbal (crier), et le verbe lui-même peut recevoir un préfixe (décrier), voire un infixe (criailler). Quand la dérivation d'un mot à un autre ne modifie pas leur catégorie grammaticale (crier > décrier), on appelle cela la dérivation propre. Dans le cas contraire (cri > crier), la dérivation est dite impropre (les autres possibilités ne sont pas abordées par le CRPE).
La composition, elle, renvoie au fait qu'une unité lexicale est formée de plusieurs mots : ainsi portemanteau, autoroute, poil à gratter, vis-à-vis sont tous des composés. Il suffit juste dans ce cas d'indiquer quels sont les lexèmes utilisés pour former l'unité.
• Il est fréquent, enfin, que le CRPE demande que la signification du mot soit donnée. Pour comprendre cette question, il faut se rappeler que le mot lui-même peut avoir plusieurs acceptions, autrement dit plusieurs sens possibles (que donne généralement le dictionnaire). Aucune épreuve du CRPE ne vous demandera de donner toutes les acceptions possibles d'un mot. En revanche, le concours peut exiger de vous que vous explicitiez ce qu'on appelle la signification d'un mot en contexte, c'est-à-dire le sens qu'il prend dans le cadre de la phrase où il est employé. Pour traiter cette question, il convient donc de s'appuyer sur les mots qui entourent celui qui est cité, et éventuellement sur d'autres indications plus larges (comme le genre du texte, et pourquoi pas la situation d'énonciation). Une fois que vous apportez la preuve, textuelle, phrastique, de la signification choisie, vous disposez de tous les points.