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Sujet

Sujet

I. Question relative au texte proposé (6 points)
Ce texte se situe en tête d'une autobiographie. Vous en ferez un commentaire en montrant comment est racontée la confrontation de la subjectivité de l'enfant à l'ordre de la langue.
II. Questions ayant trait à la grammaire, à l'orthographe et au lexique (6 points)
II. 1. Grammaire
Vous analyserez les emplois des infinitifs dans les expressions suivantes :
  • « En grand danger d'être cassé » ;
  • « qui me fit observer » ;
  • « il faut dire » ;
  • « si je parviens, aujourd'hui, à percer l'étrangeté » ;
  • « Appréhender d'un coup dans son intégrité ce mot » ;
  • « le soldat, de plomb ou de carton-pâte, vient de tomber ».
II. 2. Orthographe
Vous justifierez l'orthographe grammaticale des mots soulignés dans les expressions suivantes :
  • « l'altitude […] est fort loin d'être négligeable » ;
  • « ma pensée avait été d'abord tout entière occupée » ;
  • « poussant de tous côtés ses antennes mystérieuses ».
II. 3. Lexique
Vous indiquerez les différents sens potentiels du mot observation et montrerez que ce mot joue sur cette polysémie dans la phrase : « L'observation coupa court à ma joie ».
Texte
« L'un de mes jouets – et peu importait ce qu'il fût : il suffisait qu'il fût un jouet –, l'un de mes jouets était tombé. En grand danger d'être cassé, car la chute avait été directe et l'altitude – prise au-dessus du niveau du sol – d'une table, voire même d'un simple guéridon, est fort loin d'être négligeable, quand il s'agit de la chute d'un jouet. L'un de mes jouets, du fait de ma maladresse, – cause initiale de la chute – se trouvait sous le coup d'avoir été cassé. L'un de mes jouets, c'est-à-dire un des éléments du monde auxquels, en ce temps-là, j'étais le plus étroitement attaché. Rapidement je me baissai, ramassai le soldat gisant, le palpai et le regardai. Il n'était pas cassé, et vive fut ma joie. Ce que j'exprimai en m'écriant : « …Reusement ! » Dans cette pièce mal définie – salon ou salle à manger, pièce d'apparat ou pièce commune –, dans ce lieu qui n'était alors rien autre que celui de mon amusement, quelqu'un de plus âgé – mère, sœur ou frère aîné – se trouvait avec moi. Quelqu'un de plus averti, de moins ignorant que je n'étais, et qui me fit observer, entendant mon exclamation, que c'est « heureusement » qu'il faut dire et non, ainsi que j'avais fait : « …Reusement ! » L'observation coupa court à ma joie ou plutôt – me laissant un bref instant interloqué – eut tôt fait de remplacer la joie, dont ma pensée avait été d'abord tout entière occupée, par un sentiment curieux dont c'est à peine si je parviens, aujourd'hui, à percer l'étrangeté. L'on ne dit pas « …reusement », mais « heureusement ». Ce mot, employé par moi jusqu'alors sans nulle conscience de son sens réel, comme une interjection pure, se rattache à « heureux » et, par la vertu magique d'un pareil rapprochement, il se trouve inséré soudain dans toute une séquence de significations précises. Appréhender d'un coup dans son intégrité ce mot qu'auparavant j'avais toujours écorché prend une allure de découverte, comme le déchirement brusque d'un voile ou l'éclatement de quelque vérité. Voici que ce vague vocable – qui jusqu'à présent m'avait été tout à fait personnel et restait comme fermé – est, par un hasard, promu au rôle de chaînon de tout un cycle sémantique. Il n'est plus maintenant une chose à moi : il participe de cette réalité qu'est le langage de mes frères, de ma sœur et celui de mes parents. De chose propre à moi, il devient chose commune et ouverte. Le voilà, en un éclair, devenu chose partagée ou – si l'on veut – socialisée. Il n'est plus maintenant l'exclamation confuse qui s'échappe de mes lèvres – encore toute proche de mes viscères, comme le rire ou le cri – il est, entre des milliers d'autres, l'un des éléments constituant du langage, de ce vaste instrument de communication dont une observation fortuite, émanée d'un enfant plus âgé ou d'une personne adulte, à propos de mon exclamation consécutive à la chute du soldat sur le plancher de la salle à manger ou le tapis du salon, m'a permis d'entrevoir l'existence extérieure à moi-même et remplie d'étrangeté. Sur le sol de la salle à manger ou du salon, le soldat, de plomb ou de carton-pâte, vient de tomber. Je me suis écrié : « …Reusement ! » L'on m'a repris. Et, un instant, je demeure interdit, en proie à une sorte de vertige. Car ce mot mal prononcé, et dont je viens de découvrir qu'il n'est pas en réalité ce que j'avais cru jusque-là, m'a mis en état d'obscurément sentir – grâce à l'espèce de déviation, de décalage qui s'est trouvé de ce fait imprimé à ma pensée – en quoi le langage articulé, tissu arachnéen de mes rapports avec les autres, me dépasse, poussant de tous côtés ses antennes mystérieuses. »
Michel LEIRIS, Biffures, tiré de son autobiographie La Règle du jeu, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 2003, pp. 5-6. (1ère édition de Biffures : 1948)

Corrigé

Corrigé

I. Question relative au texte proposé (6 points)
Proposition de corrigé
Le passage extrait de Biffure de Michel Leiris se situe en tête d'une autobiographie. Il est demandé d'en faire un commentaire en montrant comment est racontée la confrontation de la subjectivité de l'enfant à l'ordre de la langue.
Si un écrivain de métier « consent » à produire un récit autobiographique, n'est-il pas naturel qu'il consacre une partie de sa narration au rapport qu'il entretient avec les mots, le langage, la parole ? Dans Biffure, tiré de La Règle du jeu (1948), Michel Leiris choisit de s'exprimer sur un des moments forts de sa rencontre avec les mots : celui où, pour ainsi dire, il est entré dans la « langue ». Nous verrons dans un premier temps ce qu'apporte ici, précisément, l'autobiographie, qui est un récit sur soi empreint de remémorations et d'oublis. Dans un second temps, nous exposerons comment, à travers l'anecdote, Michel Leiris décrit et analyse la confrontation à l'ordre de la langue comme inhérente à l'entrée dans le monde « socialisé ».
Le caractère autobiographique d'un récit ne doit pas, outre la valeur de vérité qu'on veut lui accorder, faire oublier qu'il procède d'une construction à part entière. Michel Leiris fait le choix dans La Règle du jeu d'établir un lien direct entre le narrateur et lui-même, comme personne et comme auteur. Précisément, le narrateur de La Règle du jeu porte sur l'enfant qu'il a été le regard d'un adulte : le récit qu'il offre au lecteur est peut-être moins un renvoi à des souvenirs qu'une reconstruction, en ceci notamment qu'il met tout particulièrement en scène, ici, l'incidence d'un instant sur une vie. Cet instant, c'est celui d'une « observation » que lui adresse, à la suite d'un mot tronqué (« …Reusement ! »), « quelqu'un de plus averti, de moins ignorant ». Le moment raconté par le narrateur est celui d'un choc, d'ordre langagier, qui a provoqué le surgissement hors de soi du narrateur-enfant.
Mêlant la reconstitution à l'analyse, le narrateur reconstruit l'un des événements parmi les plus déterminants d'une vie. Or, au-delà de la narration elle-même et de son caractère anecdotique, lesquels permettent de mettre en scène la subjectivité de l'enfant, l'auteur s'efforce explicitement de décrire – et même en un sens de théoriser – ce qu'est la norme linguistique à travers cette « observation » qui lui a été faite.
La norme linguistique, qui représente l'ordre de la langue, est désignée à de multiples reprises dans le texte par le biais de commentaires, de digressions et de reformulations. Ainsi est-il question de « chose partagée ou – si l'on veut – socialisée », de « significations précises », de « langage articulé » ou encore de « chose commune et ouverte ». Quand bien même on envisagerait La règle du jeu, un récit autobiographique, avec ce qu'il comporte de jugements de valeur et d'opinion personnelle, le vrai sujet est ailleurs.
Ainsi, l'extrait de Biffure s'articule-t-il en deux grands moments. Dans la première partie du récit, l'enfant est pour ainsi dire seul, même s'il est environné d'adultes. Il est au milieu de ses « jouets ». Le jouet-objet, avant qu'il ne tombe, ne se dissocie pas de celui qui le manipule. C'est dans ce contexte que le véritable événement surgit, aussitôt reformulé dans une « exclamation » et par la suite comme une « interjection pure » : ce pseudo-mot de « …Reusement ! », troncature de « Heureusement ! ». Il aura donc fallu que l'objet tombe par inadvertance pour que l'enfant revienne sinon à lui-même du moins dans l'ordre du monde. Car le vrai choc est langagier, aussi la deuxième partie de l'extrait de Biffure revient-elle sur l'événement pour en fournir de nombreux commentaires sur ce que révèle ce « vocable », l'un des « éléments constituant[s] du langage », en l'occurrence ce que le narrateur appelle en fin d'extrait le « langage articulé ». L'événement verbal qui a succédé à l'incident matériel est relayé par les adultes : l'univers socialisé, ordonné des adultes, entre tout à coup en collision avec l'enfant encore imprégné de ses jeux.
Cet extrait montre à quel point le texte autobiographique fournit ici un prétexte, pour Leiris, qui s'en saisit afin d'insister sur ce que la langue, d'une part, implique de précision, de « cycle[s] sémantique[s] » et de « conscience » linguistique propre à chacun, mais aussi, d'autre part, en quoi elle présente un enjeu social de premier plan, en tant qu'« instrument de communication » qui conditionne, comme il l'écrit, les « rapports avec les autres ». En dépit de son caractère narratif, ce texte présente de ce fait de nombreux enjeux théoriques.
Recommandations
Cette partie de l'épreuve consistait ici dans un commentaire. Contrairement à la synthèse ou dans une moindre mesure à l'analyse, cet exercice ne revient pas à confronter des textes les uns aux autres afin d'en déterminer les convergences, les divergences et les complémentarités. Il s'agit, dans le cas présent, de décrire ce que « raconte » mais aussi transmet le texte (afin d'en manifester la compréhension, précisément en reprenant certains de ses éléments et en en reformulant d'autres). Ici notamment, il s'agissait d'en commenter les enjeux autobiographiques et les faits linguistiques relevés par l'auteur.
Le rapport de l'Académie de Grenoble 2012 est assez éclairant sur ces points (même si certaines informations données, notamment en grammaire, sont très discutables). En voici un bref extrait :
« il était attendu une prise en compte de son caractère autobiographique […], de la distinction entre l'événement advenu pendant l'enfance du narrateur et sa mise en récit (fragmentation de l'événement, remémoration entrecoupée de commentaires) ; [une] identification des phénomènes linguistiques à la base de la divergence de points de vue des personnages, [ainsi qu']un commentaire du jeu entre passé et présent ».
Indications méthodologiques
• En soi, cet extrait ne comportait pas de moments ou de termes inaccessibles ou difficiles à comprendre : il suffisait juste de mesurer que tout se place en dehors et en sus de la simple anecdote du récit. La qualité du commentaire tient alors de candidats qui se sont saisi de tout ce que le récit implique d'avis, de qualifications, de commentaires métalinguistiques (« interjection », « exclamation », « articulé », etc.) propres à la réflexion de l'auteur sur « l'ordre de la langue ».
Un plan en deux parties semble le plus vraisemblable : il y a ce que manifeste la narration, et ce qui l'accompagne à proprement parler, autrement dit une théorie du langage en construction, un rapport à la norme. Cela apparaît d'autant plus dans cet extrait que Michel Leiris se mobilise pour être compris dans sa démarche : la part de commentaire est au moins aussi importante, dans ce texte, que ce qui relève d'un retour sur les événements du passé (la trame diégétique, l'intrigue).
• Rappelons que, même s'il s'agit d'un commentaire, il convient de minuter, comme pour la synthèse ou l'analyse, votre pratique de l'épreuve : tant (de minutes) pour la compréhension-surlignage (ou autre), tant pour les brouillons (au moins pour l'introduction et les débuts de paragraphe : à ne jamais bâcler !), tant pour l'écriture (des phrases assez courtes en général et qui s'enchaînent correctement), et tant pour la relecture.
Le reste renvoie bien entendu à l'écriture elle-même. À ce titre, toutes les indications sont données sur le site SIAC du Ministère (www.guide-concours-professeurs-des-ecoles.education.gouv.fr).
• Les commentaires exprimés par les correcteurs dans les jurys de concours sont sans appel : les documents sont-ils bien compris ? l'orthographe et la construction des phrases sont-elles correctes ? l'ensemble est-il organisé ? ce qui est repris répond-il à la question posée (la problématique) ? L'avantage du commentaire consiste alors dans les marges d'expression laissées aux candidats, qui peuvent prendre davantage position sur l'organisation du texte et la démarche de l'auteur.
II. Questions ayant trait à la grammaire, à l'orthographe et au lexique (6 points)
II. 1. Grammaire
Il s'agit ici d'analyser dans l'extrait de Biffure, l'emploi des infinitifs apparaissant dans les expressions suivantes : « en grand danger d'être cassé », « qui me fit observer », « il faut dire », « si je parviens aujourd'hui à percer l'étrangeté », « Appréhender d'un coup dans son intégrité ce mot », « le soldat vient de tomber ».
Pour ce type de question (très énumérative), un plan n'est pas indispensable. Il est conseillé, de ce fait, de reprendre un à un les éléments repris du document et de répondre à la question. Il est toutefois possible d'ordonner les réponses en présentant d'abord les infinitifs « sujets », les infinitifs « compléments », puis les infinitifs « périphrastiques » (après tout, le moindre détail susceptible d'accroître la « lisibilité » de la réponse est toujours le bienvenu !).
Dans la liste suivante, un infinitif a pour fonction d'être sujet (avec une possibilité de voir dans un autre un « sujet réel »), les autres sont compléments. Les périphrases sont néanmoins bien représentées, avec une difficulté spécifique : y voir un infinitif « complément » ou considérer qu'il s'agit d'un semi-auxiliaire nécessite(nt) un choix.
1. « en grand danger d'être cassé » : l'infinitif composé (« être cassé »), qui apparaît dans un groupe prépositionnel (avec la préposition « de » élidée), est ici complément du nom « danger » et fait donc partie, au même titre que l'adjectif épithète « grand », des expansions du nom.
2. « Qui me fit observer » : l'infinitif « observer » est dans ce cas employé dans une périphrase factitive, avec une valeur passive. Cette construction est fréquente avec « faire », et il est impropre d'analyser l'infinitif comme un complément d'objet.
3. « Il faut dire » : « dire » est employé au sein d'une construction dite « impersonnelle » (ou « unipersonnelle » selon les grammaires). On peut analyser l'infinitif comme le complément du verbe « falloir », ou comme son « sujet réel » (c'est dire qu'il faut). Dans ce dernier cas, il convient de rappeler que le pronom « il » du verbe impersonnel représente juste un sujet grammatical et qu'il ne porte aucune signification (aucune valeur « sémantique »).
4. « Si je parviens aujourd'hui à percer l'étrangeté » : l'infinitif « percer » est dans cette phrase le noyau d'un groupe prépositionnel (« à percer l'étrangeté ») : c'est ce groupe verbal qui a pour fonction, ici, d'être complément d'objet indirect de « parvenir », verbe transitif.
5. « Appréhender d'un coup dans son intégrité ce mot » : remarquons avant tout que le CRPE tronque ici volontairement (sans doute…) le groupe de mots concerné, car le groupe infinitif, qui est ici sujet du verbe « prendre », va en réalité jusqu'à « écorché ». La difficulté dans cet exemple, consiste dans le fait que le verbe principal, « prendre », est particulièrement distant. D'autre part, l'infinitif « appréhender » est dans cette phrase le noyau d'un groupe de mots qui contient son complément, lequel inclut lui-même un autre groupe verbal.
6. « le soldat vient de tomber » : l'infinitif « tomber », qui intègre un groupe prépositionnel (« de tomber »), est complément d'un semi-auxiliaire de temps, « venir », qui exprime avec lui un passé récent.
Recommandations
Voir ci-dessus dans les éléments de réponse. Notons de surcroît que cette question sur les infinitifs est particulièrement fréquente au CRPE, et qu'il n'est pas exceptionnel qu'elle mette les correcteurs eux-mêmes en difficulté (ainsi que les Jurys d'ailleurs). On se rappellera surtout qu'une bonne réponse est avant tout, aux concours, une réponse organisée. Plus spécifiquement, aussitôt que vous voyez « analyse » dans la question, vous devez penser « nature/fonction ». Autrement dit : quelle forme et quelle catégorie, pour quelle fonction grammaticale en contexte ? À ce titre, il se peut que la nature (vous analyserez les pronoms, noms, adjectifs, etc.) ou la fonction (vous analyserez les compléments, les sujets, etc.) soit déjà donnée : cela permet de se concentrer alors sur l'un des deux pans de l'analyse.
II. 2. Orthographe
Cette question demande de justifier l'orthographe grammaticale des mots soulignés dans les expressions suivantes : « L'altitude […] est fort loin d'être négligeable », « Ma pensée avait été d'abord tout entière occupée », « poussant de tous côtés ses antennes mystérieuses ».
Cette rubrique orthographique est à la fois lexicale et grammaticale et pose trois questions simultanément : celle de la variabilité des mots employés (et de leur éventuelle invariabilité), celle de leur catégorie grammaticale, et celle de la chaîne d'accord dans laquelle ils apparaissent. Nous donnerons des éléments de réponse à ces données pour chacun des exemples proposés.
1. « L'altitude […] est fort loin d'être négligeable » : « fort », dérivé d'un adjectif, est dans ce cas employé comme un adverbe d'intensité d'un autre adverbe (« loin »), et il est donc invariable. À ce titre, il ne marque pas l'accord avec le sujet du verbe « être », dont il n'est pas l'attribut à lui seul.
2. « Ma pensée avait été d'abord tout entière occupée » : dans cette phrase, « tout », paraphrasable par « totalement », est là aussi un adverbe invariable, et ne marque donc aucun accord avec les mots qui l'entourent.
3. « poussant de tous côtés ses antennes mystérieuses » : contrairement aux exemples précédents, nous avons ici un « tous » adjectif, qui s'accorde en genre (masculin) et en nombre (pluriel) avec le nom « côtés ». « Tous » fonctionne comme un déterminant (certaines grammaires parlent dans ce cas de « pré-déterminant » : cf. « de tous les côtés »).
Recommandations
L'invariabilité est partie intégrante du questionnement orthographique. Les exemples proposés ne présentaient pas ici de difficulté particulière, en ceci que l'on repère assez aisément les adverbes par rapport à l'adjectif.
Outre les domaines de réflexion que nous avons énumérés dans la présentation (variabilité, catégorie grammaticale et chaîne d'accord), ce type de questionnement orthographique est directement lié à la difficulté que représentent les homophones (tout en particulier). Bien qu'elle relève aussi de l'orthographe lexicale, cette rubrique interroge également l'orthographe dite « grammaticale » et présente à ce titre un enjeu important. Tout candidat en mesure de le souligner, en présentation ou en conclusion, s'attire forcément la bienveillance des correcteurs…
III. 3. Lexique
Il est demandé d'indiquer les différents sens potentiels du mot « observation » et de montrer que ce mot joue sur cette polysémie dans la phrase : « L'observation coupa court à ma joie ».
Ce type de question s'ouvre clairement sur les données du contexte : outre l'acception du mot (sa signification possible dans cette construction grammaticale), il convient de prendre en compte les autres éléments lexicaux qui l'entourent, à l'avant et à l'après, tout en montrant comment il se combine, localement, avec les mots du groupe verbal auquel il appartient.
Ici :
« Observation », comme nom féminin, peut être synonyme de « remarque ». L'attention de l'interlocuteur est alors attirée, focalisée sur un point. Dans « L'observation coupa court à ma joie », l'exaltation de l'enfant est stoppée par une « remarque » portée sur un défaut d'articulation.
D'autre part, le mot, en tant qu'élément de la même famille dérivationnelle du verbe « observer », renvoie à l'acte de regarder attentivement autour de soi, et peut ne pas avoir de valeur strictement métalinguistique (un avis sur la langue elle-même). Dans « L'observation coupa court à ma joie », on peut comprendre que le narrateur réalise que loin d'être isolé, il est soumis à l'attention vigilante des personnes qui l'entourent. En effet, il s'agit bien pour l'enfant d'intégrer un « langage socialisé », autrement dit d'entrer dans un « rapport avec les autres », comme l'écrit l'auteur.
Recommandations
• Pour le traitement des questions dites « de lexique », plusieurs notions sont incontournables.
D'une part, concernant la formation des mots, rappelons qu'il n'en est que deux possibles en français : soit par dérivation, soit par composition. La langue dérive un mot d'un autre généralement par affixation : dans ce cas, à un lexème, elle ajoute un affixe (en début de mot, un préfixe ; en fin de mot un suffixe – et plus rarement, en milieu de mot, un infixe). Par exemple, le lexème cri peut recevoir un suffixe verbal (crier), et le verbe lui-même peut recevoir un préfixe (décrier), voire un infixe (criailler). Quand la dérivation d'un mot à un autre ne modifie pas leur catégorie grammaticale (crier > décrier), on appelle cela la dérivation propre. Dans le cas contraire (cri > crier), la dérivation est dite impropre (les autres possibilités ne sont pas abordées par le CRPE).
La composition, elle, renvoie au fait qu'une unité lexicale est formée de plusieurs mots : ainsi portemanteau, autoroute, poil à gratter, vis-à-vis sont tous des composés. Il suffit juste dans ce cas d'indiquer quels sont les lexèmes utilisés pour former l'unité.
• Il est fréquent, enfin, que le CRPE demande que la signification du mot soit donnée. Pour comprendre cette question, il faut se rappeler que le mot lui-même peut avoir plusieurs acceptions, autrement dit plusieurs sens possibles (que donne généralement le dictionnaire). Aucune épreuve du CRPE ne vous demandera de donner toutes les acceptions possibles d'un mot. En revanche, le concours peut exiger de vous que vous explicitiez ce qu'on appelle la signification d'un mot en contexte, c'est-à-dire le sens qu'il prend dans le cadre de la phrase où il est employé. Pour traiter cette question, il convient donc de s'appuyer sur les mots qui entourent celui qui est cité, et éventuellement sur d'autres indications plus larges (comme le genre du texte, et pourquoi pas la situation d'énonciation). Une fois que vous apportez la preuve, textuelle, phrastique, de la signification choisie, vous disposez de tous les points.