Hobbes, « Le Citoyen »
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Un autre texte de Hobbes qui propose une conception de la liberté compatible avec les lois d'un État :
« Communément on tient que la liberté consiste à pouvoir faire impunément tout ce que bon nous semble et que la servitude est une restriction de cette liberté. Mais on le prend fort mal de ce biais-là ; car, à ce compte, il n'y aurait personne de libre dans la république, vu que les États doivent maintenir la paix du genre humain par l'autorité souveraine, qui tient la bride à la volonté des personnes privées. Voici quel est mon raisonnement sur cette matière : je dis que la liberté n'est autre chose que l'absence de tous les empêchements qui s'opposent à quelque mouvement ; ainsi l'eau qui est enfermée dans un vase n'est pas libre, à cause que le vase l'empêche de se répandre et, lorsqu'il se rompt, elle recouvre sa liberté. Et de cette sorte une personne jouit de plus ou moins de liberté, suivant l'espace qu'on lui donne ; comme dans une prison étroite, la captivité est bien plus dure qu'en un lieu vaste où les coudées sont plus franches. D'ailleurs un homme peut être libre vers un endroit et non pas vers quelque autre ; comme en voyageant on peut bien s'avancer et gagner un pays, mais quelquefois on est empêché d'aller du bon côté par les haies et par les murailles dont on a garni les vignes et les jardins. Cette sorte d'empêchement est extérieure et ne reçoit point d'exception ; car les esclaves et les sujets sont libres de cette sorte s'ils ne sont en prison ou à la chaîne. »
Hobbes, Le Citoyen, Paris, Flammarion, 1993, Livre II, Chapitre IX, § 9